Homélie du 29 sept – messe de rentrée – P. Simonnin
Terrible tendance au ghetto ! Jean n’a pas encore bien écouté le coeur de Jésus. Un cœur qui bat pour tous les hommes, même pour ceux qui ne le suivent que de très loin. Mais qui est loin ou près du Christ ? Qui est “pour Jésus” ? Ce n’est pas si évident. Rappelons-nous l’histoire du bon samaritain, avec les deux autres personnages que sont le prêtre et le lévite. Deux messieurs très bien et un type catalogué comme douteux. Pourtant, les gens très bien sont à des kilomètres de Jésus. Et au jugement dernier ? Les rejetés n’en reviennent pas d’être rejetés, et les bénis n’en reviennent pas d’être des bénis.
Manifestement, le regard de Jésus sur les hommes n’est pas tout à fait notre regard. Dans un monde soigneusement étiqueté bon ou mauvais, Jésus osait dire que des prostituées et des publicains étaient plus proches de lui que certains pharisiens.
Mais alors, on s’y perd ? Oui ou non, y a-t-il une claire appartenance à Jésus? Si les baptisés, les bons paroissiens, les militants du tonnerre ne sont pas le Peuple de Dieu, où est-il ce peuple ?
“Celui qui n’est pas contre nous, répond Jésus, est pour nous.” C’est vraiment fluide ! C’est carrément le contraire de la secte, où l’on dit tout à l’inverse : “Celui qui n’est pas pour nous, est contre nous”… Jésus nous enseigne qu’il n’appartient à personne, pas même aux Eglises. Chaque fois qu’un homme libère son frère et le remet debout, l’Evangile commence à s’accomplir.
Mais du coup, on risque bien de s’y perdre… Le rassemblement ecclésial n’est-il plus qu’un vague ensemble de sympathisants et de non-contre ? Sûrement pas ! Il y a des nettement pour, mais il faudra toujours se débattre entre le ghetto et le flou. Entre la nécessaire inscription au catéchisme et sur les registres de la paroisse, et l’accueil de quiconque souffre, est pauvre, humilié, et quiconque est honnête et bon. Tous ces derniers sont de la suite du Christ, ou par leur situation ou par leur valeur humaine.
L’idéal est de pouvoir aller jusqu’à l’adhésion explicite à Jésus. Mais l’appartenance à l’Evangile se juge aux fruits donnés, pas aux certificats de baptême. Les bons paroissiens sont évidemment des proches du Christ, et parfois les plus proches, mais pas parce qu’ils sont inscrits ou font consciencieusement leur devoir de chrétiens.
Ils sont proches du Christ dans la mesure où ils aiment. C’est finalement le seul critère d’appartenance. Et en ce sens, ils sont des prophètes, c’est-à-dire qu’ils annoncent la Parole de Dieu, en paroles, mais aussi et surtout en actes.
Ce à quoi il faut se hâter d’ajouter que pour aimer comme Jésus veut que nous aimions, rien ne vaut la connaissance de l’Evangile, la force puisée dans les sacrements et la vie fraternelle en Eglise. Plus le cercle des sympathisants se fait large et indécis, plus s’impose la netteté et la vitalité d’un centre d’où se diffusent justement la sympathie pour Jésus et les moyens de vivre son esprit.
Cette dernière remarque est l’occasion pour moi, en cette messe de rentrée, de lancer un appel : de par notre baptême, nous sommes tous prêtres, prophètes et rois (au sens biblique de serviteurs). On est serviteur de son prochain, proche ou lointain, de ses proches… On peut aussi être serviteur de son Eglise, de sa communauté paroissiale. Eh oui ! Car pour être vivante, pour être chemin vers le Christ, notre communauté paroissiale a besoin de personnes qui se mettent à son service ! Les besoins sont multiples. Si vous êtes inspirés ; signalez-vous à l’EAP au moment du pot de l’amitié – ils sont faciles à reconnaître : ils portent une écharpe de couleur rouge
Pour terminer, quelques mots sur la seconde partie de l’évangile que nous venons d’entendre. Comme l’a dit Dominique en introduction, il ne s’agit pas de prendre ces paroles au pied de la lettre, sinon, nous serions tous ici, manchots, estropiés, et borgnes.
Il s’agit là d’un procédé littéraire, qu’on appelle en termes savants l’hyperbole, où l’on exagère très fortement, pour frapper les esprits.
Remarquons que tous les actes décrits sont jugés par rapport à leurs conséquences sur les autres, particulièrement les “petits”. Ces petits sont les croyants fragiles et faibles, à qui manquent le savoir, le pouvoir et l’avoir. ceux qui sont à la merci de maîtres du savoir ou des esprits forts. Comme le Père, Jésus n’hésite pas à quitter le troupeau pour retrouver la brebis perdue. Nous ne pouvons pas faire moins que lui…